Aix-en-Provence, Grand Théâtre de Provence: Renaud Capuçon & Orchestre Philharmonique Royal de Liège

Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence, saison 2025/2026
Orchestre Philharmonique Royal de Liège
Direction musicale Renaud Capuçon
Violon Renaud Capuçon
Camille Pépin: La nuit n’est jamais complète (Création pour orchestre); Wolfgang Amadeus Mozart: Concerto pour violon n°4; Richard Wagner: Siegfried-Idyll; Richard Strauss: Intermezzo 4 interludes symphoniques
Aix-en-Provence, le 23 octobre 2025
En cette soirée du 23 octobre 2025, le GTP d’Aix-en-Provence nous conviait à un concert éclectique et alléchant avec des œuvres couvrant les XVIII°, XIX°, XX° et XXI° siècles, dont la création tout à fait contemporaine de la compositrice Camille Pépin, avec un Renaud Capuçon interprète et chef d’orchestre. Quoi de plus attrayant et diversifié ? Camille Pépin n’est pas une inconnue pour le public aixois, pas plus que pour Renaud Capuçon qui a déjà créé “Si je te quitte, nous nous souviendrons” pièce écrite pour piano et violon. Sa musique inspirée et inspirante reste tonale, agréable à écouter tout en étant d’une écriture moderne. Camille Pépin cherche l’inspiration dans la beauté, de la nature aussi bien que des sentiments, à la croisée de l’impressionnisme et du répétitif. Partant d’un des derniers poèmes d’amour de Paul Eluard “La Nuit n’est jamais complète“, la compositrice est portée vers l’espoir et la lumière. Renaud Capuçon, à la tête de l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège, s’empare de cette partition faisant sonner avec intensité reliefs et couleurs dans des tempi allant ou plus apaisés. Cette musique d’atmosphères, où les longueurs d’archets des cordes créent les climats, laisse aussi ressortir trombones et bassons pour des ambiances plus inquiétantes alors que vibraphone et marimba égrainent des sons plus éthérés. Lumière et sonorités jouent avec les légers coups de tam-tam tout en apaisant les grondements des timbales. Comme porté par une main tendue, l’apaisement est revenu. Dans une gestuelle claire, Renaud Capuçon a su canaliser les sonorités et les nuances pour une interprétation colorée, imagée et de grande intensité. Délaissant la baguette pour l’archet, c’est Mozart qui allait inspirer le violoniste dans son concerto pour violon n°4. Imprimant de l’archet un tempo sans lenteur dans cette œuvre affirmée aux rythmes incisifs, Renaud Capuçon nous livre une interprétation élégante et claire. Vitesse d’archet, justesse parfaite et fluidité du jeu font résonner la cadence avec aisance et souplesse. L’Andante, introduit avec délicatesse par l’orchestre, laisse le soliste s’exprimer avec simplicité et pureté de style. Plus dansant, le Rondeau du 3ème mouvement fait ressortir la fraîcheur de ce concerto jusque dans le petit détaché joué avec humour. A la vélocité de main gauche aux attaques nettes répondent cors et hautbois dans une ambiance folklorique et joyeuse. Très belle interprétation. Quelques phrases langoureuses de L’Etude Daphné de Richard Strauss, jouées en Bis avec souplesse et intensité de son, nous emmènent vers Siegfried-Idyll, une page de Richard Wagner, tout en délicatesse et musicalité, composée et offerte à sa femme Cosima pour son anniversaire alors qu’elle vient de donner naissance à leur fils Siegfried. Y-a-t-il plus beau symbole que cette musique d’une pure tendresse où chaque respiration, chaque note posée est une déclaration d’amour ? Extrêmement bien écrit, ce court poème symphonique reprend certains thèmes de l’opéra Siegfried joués par divers instruments pour des sonorités différentes mais toujours avec délicatesse dans un souffle infini. Renaud Capuçon dans un tempo sans lenteur laisse ce souffle devenir passion ou donne, plus sensiblement, la parole aux sonorités des cors en réminiscence. Un moment de paix et de délicatesse. Tirés de l’opéra en 2 actes “Intermezzo“, comédie bourgeoise écrite par Richard Strauss en pensant à sa vie domestique, les 4 Interludes symphoniques reflètent tout ce qui caractérise la musique du compositeur. La rapidité du style, les harmonies que l’on ne retrouve que dans son écriture et, en premier lieu, ses valses entraînantes mais sensibles. Humour, folklore, joie mais aussi phrases langoureuses où le compositeur rajoute une partie de piano. Renaud Capuçon laisse sonner l’orchestre découvrant toutes ses possibilités de couleurs et d’interprétation tout en laissant la parole aux instruments solistes. Chaque facette du compositeur est ici explorée par un chef d’orchestre qui n’hésite pas à rendre palpables les sentiments explosifs ou tendres du compositeur. Une œuvre qui séduit le public et termine ce concert avec éclat. Photo Claire Gaby