Marseille, Festival de Musique Sacrée 2014, Eglise Saint-Michel
Orchestre et Choeur de l’Opéra de Marseille
Direction Musicale Fabrizio Maria Carminati
Chef de Choeur Pierre Iodice
Ténor Jean-François Borras
Baryton Yann Toussaint
Basse Philippe Kahn
Giuseppe Verdi: Da Quattro pezzi sacri – “Stabat Mater” per coro e orchestra, “Laudi alla Vergine Maria”
per coro di soprani e contralti a cappella
Giacomo Puccini: Messa di Gloria, per soli coro e orchesta
Marseille, 23 mai 2014
C’est dans le cadre du Festival de Musique Sacrée, et sous les voûtes de l’église Saint-Michel, que nous écoutions un concert réservé à deux compositeurs italiens, plus connus pour leurs compositions d’opéras : Giuseppe Verdi et Giacomo Puccini, et c’est au chef d’orchestre Fabrizio Maria Carminati, italien lui aussi, qu’était confiée la direction musicale.
Au programme, deux pièces faisant partie des Quattro Pezzi Sacri de Giuseppe Verdi : Stabat Mater et Laudi alla Vergine Maria, et la Messa di Gloria, de Giacomo Puccini. Un concert où le choeur, très sollicité, allait être à l’honneur. Les parties de choeur chantées dans les églises sont toujours des moments privilégiés, et ce soir, nous allions être particulièrement gâtés.
Giuseppe Verdi compose ces Quattro Pezzi vers la fin de sa vie ; l’Ave Maria étant ajouté plus tard, c’est donc Tre Pezzi Sacri qui seront jouées pour la première fois à Paris dans le cadre des concerts de la société des concerts du conservatoire.
Même si l’on retrouve le lyrisme de Verdi dans les phrases chantées au début par les basses, le caractère religieux se fait sentir dès les premiers accords. On peut toujours craindre une trop grande réverbération dans les églises pour les passages joués forte, mais ce soir, grâce à une interprétation très équilibrée, nous ne serons pas gênés par ce phénomène acoustique naturel, malgré une orchestration parfois assez fournie incluant de belles parties de cuivres. Dans ce Stabat Mater, la souffrance de la mère est omniprésente, aussi bien dans le graves des voix que dans les aigus des soprani, comme une plainte déchirante. Les tempi respectent le caractère douloureux, et les montées en puissance se font sans brutalité avec des arrêts nets qui laissent résonner les vibrations. Le Maestro Fabrizio Maria Carminati dirige d’une baguette ferme, sans raideur, amenant les ralentis avec souplesse. Il fait ressortir les diverses parties musicales, diminuant l’orchestre afin de laisser passer le choeur qui peut chanter librement sans forcer. Après des attaques distinctes, les voix se fondent avec une grande homogénéité. L’orchestre accompagne avec délicatesse et rondeur de son, et cette rondeur de son se remarque aussi dans les notes tenues par les cors qui font un tapis sonores aux voix. Les fins de phrases murmurées contrastent avec les larges crescendi.
La seconde pièce choisie est le choeur de femmes a cappella, Laudi alla Vergine Maria. C’est un moment de pure grâce, chanté avec profondeur et recueillement par un choeur inspiré. les voix distinctes s’harmonisent, élevées par les sons célestes des soprani. D’une justesse parfaite, cette architecture vocale est posée sur des voix graves qui résonnent en de larges vibrations. Ce sont cinq minutes de pur délice religieux et musical. La direction sensible et souple fait ressortir avec nuance chaque registre des voix, pour finir dans un Ave murmuré.
La Messa di Gloria, de Giacomo Puccini, avait été choisie pour terminer ce concert. Bien qu’appelée Messa di Gloria, c’est pourtant une messe complète que Puccini compose à l’âge de vingt ans pour son examen de sortie du conservatoire.
Oeuvre religieuse s’il en est, cette messe aussi bien écrite pour les voix que pour l’orchestre, est traitée avec beaucoup d’optimisme avec même certains passages tout à fait joyeux, prenons pour exemple le début du Gloria. C’est une oeuvre écrite avec délicatesse, qui fait ressortir les lignes musicales, qu’elles soient jouées par les instruments ou chantées par les solistes et le choeur. Elle est exécutée ici avec un bel équilibre et une recherche de sonorités, la partie orchestrale faisant la liaison entre les divers passages chantés avec un certain lyrisme. Nous écoutons trois artistes français.
Jean-François Borras, ténor, chante la partie soliste d’une voix claire et bien placée, faisant ressortir sa musicalité dans un joli legato et sa bonne projection des sons lui permet de passer sans forcer au-dessus de l’orchestre. Tout en gardant une grande homogénéité dans chaque registre, sa voix s’harmonise avec celle de la basse pour un duo sensible.
Philippe Kahn, que nous avions entendu en début de saison à Marseille dans Aïda, où il interprétait le rôle de Pharaon, chante ici la partie de basse. Dans cette église, sa voix au timbre agréable passe bien, elle demanderait toutefois à être un peu plus projetée pour des attaques plus nettes, mais elle est puissante et les crescendi se font avec une belle ampleur de son.
Yann Toussaint, baryton, n’a pas une partie très importante à chanter, on peut néanmoins remarquer un timbre agréable et rond dans le medium. Il utilise un legato musical qui sait s’adapter aux sonorités de l’orchestre.
Fabrizio Maria Carminati dirige toute cette messe avec une grande sensibilité et un grand respect des nuances qui peuvent aller d’un murmure à d’immenses crescendi, donnant une interprétation qui fait ressortir l’essence même de la musique de Puccini. Les vibrations des voix s’harmonisent avec le velouté des sonorités du quatuor, les cuivres ne couvrent pas les chanteurs et les trompettes ont trouvé un son noble pour leurs interventions. L’orchestre a montré une intelligence et une grande souplesse d’interprétation, avec des sonorités qui s’adaptent au caractère de chaque phrase musicale.
Le choeur investi et homogène, aura fait preuve d’une grande musicalité ainsi que d’une grande connaissance du chant, sachant se faire entendre avec puissance ou diminuant l’intensité avec souplesse tout en maintenant un rythme soutenu dan le fugato. C’est un concert qui nous laisse sur une impression de perfection où tout semblait être en harmonie.
Le Stabat mater repris en bis a permis de prolonger ce moment de grâce.