Opéra de Marseille, saison 2022/2023
Orchestre Philharmonique de Marseille
Direction musicale Lawrence Foster
Violoncelle Xavier Chatillon
Alto Magali Demesse
Josef Strauss: La musique des sphères (Valse); Johannes Brahms: Symphonie No3 en fa majeur; Richard Strauss: “Don Quichotte” poème symphonique avec violoncelle et alto
Marseille, le 18 janvier 2023
En cette soirée du 18 janvier, L’Orchestre Philharmonique de Marseille, conduit par son directeur musical Lawrence Foster, nous conviait à un concert au programme très attractif. Musique viennoise, musique allemande, mais musique qui, malgré ses origines, laisse transparaître des moments d’humour et de légèreté. Josef Strauss le viennois, Richard Strauss l’allemand, mais aussi Johannes Brahms qui délaissera son Allemagne natale pour s’installer à Vienne où il mourra. Les dernières envolées du concert du Nouvel an semblent encore présentes et revenir ici, en réminiscence, avec grâce et élégance dans un tempo hésitant pour cette valse, Musique des sphères, de Josef Strauss. Joyeuse, légère, cette musique laisse ressortir l’unité de son des cordes posé sur l’appui des basses qui structurent cette harmonie.Le jeu des nuances et de ritardando bien amenés fait tournoyer les longues jupes des danseuses et nous plonge dans la Vienne du XIXe siècle avec des trompettes qui apportent relief et éclat. Un moment passé dans la douceur d’un style de vie au son d’un orchestre inspiré qui entraîne le public. Si Johannes Brahms n’est pas viennois, c’est pourtant dans cette ville que sa troisième symphonie sera créée le 2 décembre 1883 sous la baguette de Hans Richter qui la surnommera L’Héroïque en référence à la troisième symphonie de Beethoven bien qu’elle soit plus proche de celle de Robert Schumann, selon les dires de Clara Schumann, qui y retrouvait les accents de sa troisième symphonie, la Rhénane. La proposition faite ici par le maestro Foster est plutôt une symphonie en demi-teinte où les envolées d’un romantisme finissant semblent absentes par moments, avec un choix de tempi assez modérés pour une interprétation presque séquentielle. Certes, dans cette symphonie d’une écriture très personnelle, Johannes Brahms change souvent d’humeur et d’atmosphères mais il réussit à trouver des liens, passant du mineur au majeur ou changeant subitement de nuances pour des expositions de sentiments parfois très différents. Ainsi, l’entrée bucolique du deuxième mouvement est un réel contraste avec les accords des cuivres qui débutent la symphonie. C’est dans une belle homogénéité de son que la petite harmonie s’unie aux cordes dans cet Andante qui finit dans un choral pianissimo. Très attendu l’Allegretto, rendu célèbre par le film d’Anatole Litvak inspiré du roman de Françoise Sagan “Aimez-vous Brahms”, avec ce thème magnifique interprété avec charme par le pupitre de violoncelles dans une belle longueur d’archets et repris avec sensibilité par la flûte et le hautbois. Un mouvement empreint de nostalgie et d’un romantisme contenu. De belles couleurs dans le solo de cor qui, dans un son rond et moelleux, reprend ce thème aux belles harmonies. Vif et mystérieux l’Allegro aux archets incisifs dans une énergie retrouvée. Brahms est revenu dans un superbe ensemble ; attaques nettes et force des cuivres, son au fond des temps, accents des cordes, jolie phrase des altos, nuances appropriées, unité des cors… La puissance des trombones dans ce dernier choral s’estompe dans une longue tenue piano. Une demi-teinte qui finit par un éclat. Même si l’on aime Brahms, c’est sans conteste “Don Quichotte”, le poème symphonique de Richard Strauss que nous attendions avec impatience. Vous voulez approcher le roman de Miguel de Cervantes mais vous n’avez pas le courage d’affronter les deux volumes?
Alors écoutez l’œuvre de Richard Strauss et, en quarante minutes, vous serez happé par ce récit. Devant vous Don Quichotte se battra contre les moulins à vent, combattra une armée de moutons, rencontrera Dulcinée… chevauchant sa jument Rossinante suivi par son fidèle écuyer Sancho Panza montant son âne Rucio, puis mourra. Une rencontre extraordinaire avec Richard Strauss, l’orchestre et deux merveilleux solistes. Le talentueux violoncelle solo de l’orchestre Xavier Chatillon est Don Quichotte, suivi par son fidèle écuyer Sancho Panza interprété par la non moins talentueuse alto solo de l’orchestre Magali Demesse. Quarante minutes de pur plaisir musical. Un orchestre au mieux de sa forme, qui suit le chef avec attention et participe aux aventures de nos héros. Y-a-t-il moment plus douloureux plus musical que cette mort de Don Quichotte ? Une orchestration monumentale et néanmoins imagée pour ce poème symphonique en dix variations créé le 8 mars 1898 et sous-titré “variations fantastiques sur un thème à caractère chevaleresque”. Un chef d’œuvre ! Mais entrons dans le vif du sujet comme le fait le compositeur dans l’exposition des thèmes avec la clarinette ou la phrase langoureuse des altos. Dans cette orchestration luxuriante chaque instrument prend la parole, joue son rôle ou crée le décor. Violon solo qui répond avec charme à l’alto, clarté de son de la clarinette, mais son du tuba venu des profondeurs, trompettes en flatterzung jouant avec sourdine ou duo de bassons imitant des moines à moitié sorciers et machine à vent alors que Don Quichotte s’envole en combattant des géants qui ne sont autres que des moulins, timbales marquant le destin… Mais attardons-nous sur les deux solistes; Don Quichotte le rêveur, l’utopiste, le chevalier qui meurt conscient de sa noblesse et Sancho Panza le paysan d’une fidélité exemplaire et dont la lucidité est empreinte d’humour. Magali Demesse le dépeint avec toute l’énergie de son alto qui s’identifie au personnage; facétieux certes, mais attachant. Longues phrases sentimentales sur une belle longueur d’archet et vibrato intense qui donne la rondeur du son et du personnage. Ce Sancho peut avoir un certain charme dans un joli glissando, mais aussi du caractère avec ces rythmes aux attaques nettes pour cette danse rapide sans oublier les notes d’humour caractéristiques de cet homme pittoresque. Une superbe interprétation qui laisse ressortir la technique et la musicalité de la soliste et donne vie à ce personnage truculent. Mais il reviendra à Xavier Chatillon de représenter le personnage complexe de Don Quichotte, parfois altier, fier de sa noblesse ou en pleine exaltation héroïque si bien dépeint pas Richard Strauss. Avec intelligence et une grande compréhension du personnage, le soliste s’empare de son violoncelle et nous fait vivre les aventures et les hallucinations du Chevalier à la triste figure. Profondeur du son ou pizzicati sonores, Xavier Chatillon explore toutes les possibilités de son instrument avec une solidité de main gauche aux démanchés assurés et un vibrato intense qui amène l’émotion dans des phrases lentes mais habitées. Exaltation dans l’agitato énergique, mais nostalgie dans la longueur d’archet qui procure ce son velouté. Dans cette interprétation imagée, Don Quichotte prend vie; les phrases sentimentales aux notes attaquées avec souplesse résonnent dans le grave alors que les sons aigus et purs changent les atmosphères. Don Quichotte expose, discute avec les instruments, avec l’alto de Sancho, dans des sonorités modulées, douces ou incisives grâce à une solide technique d’archet. Mais, rien de plus musical que la mort de notre anti-héros. Le violoncelle revient sur des souvenirs dans des sons graves avec la clarinette, puis meurt dans un long glissando et un dernier soupir. Superbe d’émotion ! Xavier Chatillon revient et nous offre en bis la Sarabande de la deuxième sonate pour violoncelle seul de Jean-Sébastien Bach. Avec calme et dans un tempo sans trop de lenteur la technique ressort en filigrane ; elle n’est que le support de la musicalité. Respirations, justesse des doubles cordes, archet à la corde qui laisse résonner les sons. Cette interprétation tout intérieure fait suite à la mort de Don Quichotte. L’on retient son souffle avant que fusent les bravos. Superbe !
Alors écoutez l’œuvre de Richard Strauss et, en quarante minutes, vous serez happé par ce récit. Devant vous Don Quichotte se battra contre les moulins à vent, combattra une armée de moutons, rencontrera Dulcinée… chevauchant sa jument Rossinante suivi par son fidèle écuyer Sancho Panza montant son âne Rucio, puis mourra. Une rencontre extraordinaire avec Richard Strauss, l’orchestre et deux merveilleux solistes. Le talentueux violoncelle solo de l’orchestre Xavier Chatillon est Don Quichotte, suivi par son fidèle écuyer Sancho Panza interprété par la non moins talentueuse alto solo de l’orchestre Magali Demesse. Quarante minutes de pur plaisir musical. Un orchestre au mieux de sa forme, qui suit le chef avec attention et participe aux aventures de nos héros. Y-a-t-il moment plus douloureux plus musical que cette mort de Don Quichotte ? Une orchestration monumentale et néanmoins imagée pour ce poème symphonique en dix variations créé le 8 mars 1898 et sous-titré “variations fantastiques sur un thème à caractère chevaleresque”. Un chef d’œuvre ! Mais entrons dans le vif du sujet comme le fait le compositeur dans l’exposition des thèmes avec la clarinette ou la phrase langoureuse des altos. Dans cette orchestration luxuriante chaque instrument prend la parole, joue son rôle ou crée le décor. Violon solo qui répond avec charme à l’alto, clarté de son de la clarinette, mais son du tuba venu des profondeurs, trompettes en flatterzung jouant avec sourdine ou duo de bassons imitant des moines à moitié sorciers et machine à vent alors que Don Quichotte s’envole en combattant des géants qui ne sont autres que des moulins, timbales marquant le destin… Mais attardons-nous sur les deux solistes; Don Quichotte le rêveur, l’utopiste, le chevalier qui meurt conscient de sa noblesse et Sancho Panza le paysan d’une fidélité exemplaire et dont la lucidité est empreinte d’humour. Magali Demesse le dépeint avec toute l’énergie de son alto qui s’identifie au personnage; facétieux certes, mais attachant. Longues phrases sentimentales sur une belle longueur d’archet et vibrato intense qui donne la rondeur du son et du personnage. Ce Sancho peut avoir un certain charme dans un joli glissando, mais aussi du caractère avec ces rythmes aux attaques nettes pour cette danse rapide sans oublier les notes d’humour caractéristiques de cet homme pittoresque. Une superbe interprétation qui laisse ressortir la technique et la musicalité de la soliste et donne vie à ce personnage truculent. Mais il reviendra à Xavier Chatillon de représenter le personnage complexe de Don Quichotte, parfois altier, fier de sa noblesse ou en pleine exaltation héroïque si bien dépeint pas Richard Strauss. Avec intelligence et une grande compréhension du personnage, le soliste s’empare de son violoncelle et nous fait vivre les aventures et les hallucinations du Chevalier à la triste figure. Profondeur du son ou pizzicati sonores, Xavier Chatillon explore toutes les possibilités de son instrument avec une solidité de main gauche aux démanchés assurés et un vibrato intense qui amène l’émotion dans des phrases lentes mais habitées. Exaltation dans l’agitato énergique, mais nostalgie dans la longueur d’archet qui procure ce son velouté. Dans cette interprétation imagée, Don Quichotte prend vie; les phrases sentimentales aux notes attaquées avec souplesse résonnent dans le grave alors que les sons aigus et purs changent les atmosphères. Don Quichotte expose, discute avec les instruments, avec l’alto de Sancho, dans des sonorités modulées, douces ou incisives grâce à une solide technique d’archet. Mais, rien de plus musical que la mort de notre anti-héros. Le violoncelle revient sur des souvenirs dans des sons graves avec la clarinette, puis meurt dans un long glissando et un dernier soupir. Superbe d’émotion ! Xavier Chatillon revient et nous offre en bis la Sarabande de la deuxième sonate pour violoncelle seul de Jean-Sébastien Bach. Avec calme et dans un tempo sans trop de lenteur la technique ressort en filigrane ; elle n’est que le support de la musicalité. Respirations, justesse des doubles cordes, archet à la corde qui laisse résonner les sons. Cette interprétation tout intérieure fait suite à la mort de Don Quichotte. L’on retient son souffle avant que fusent les bravos. Superbe !